L’artiste franco-chinois du Serpent d’océan de Saint Brévin revient à Nantes pour nous présenter ses « mues ». C’est à la HAB galerie, sur le quai des Antilles, et dans le cadre du Voyage à Nantes, que cette exposition explore les thèmes chers à l’artiste.
Huang Yong Ping
D’accord P’tite Lu, je ne le connaissais pas vraiment non plus cet artiste. Tout juste avais-je déjà vu son extraordinaire Serpent d’Océan, œuvre pérenne du parcours Estuaire, que je t’emmènerai d’ailleurs voir lors d’un prochain renc’Art.
Alors… voilà, ce monsieur là est né en 1954 dans le Xiamen en Chine populaire. Artiste contemporain influencé par le courant dadaïste, Huang Yong Ping crée des œuvres lourdes de sens qui ont souvent été censurées par le gouvernement de son pays. Il a exposé à Paris en 1989 pour la grande exposition des Magiciens de la Terre au Centre George Pompidou et a ensuite choisi de s’installer dans notre doux pays. Il sera l’artiste phare de Monumenta, la biennale qui se tiendra au Grand Palais en 2016.
Mais avant cela, c’est à Nantes que HYP s’est arrêté et a conçu une nouvelle œuvre monumentale, fil d’Ariane qui se déroule tout au long d’une exposition qui rassemble une dizaine de ses œuvres. Suis moi p’tite Lu, je t’emmène…
Mue de serpent, 2014
Argggghhhh !!! Un serpent géant ! Non ma p’tite Lu, ceci n’est pas un serpent, ceci est une mue de serpent ! Géante certes, sans aucun doute celle du Serpent d’ Océan, dont elle a les mensurations. Ses 120 mètres de long vont jalonner ton parcours dans l’exposition. Elle serpente dans toute la Galerie, présence fantomatique d’un serpent qui n’est plus, et qui aurait laissé là sa peau avant de disparaître dans la Loire pour rejoindre l’Océan. Cette mue, constituée d’une cinquantaine de morceaux de tulle résinée, symbolise le vivant qui devient mort mais aussi bien sûr la mutation, la transformation. Le serpent quitte sa peau et s’allège en laissant derrière lui ce qui l’alourdissait. Tu perçois le message p’tite Lu ?
L’Ombre blanche, 2009
Aux côtés du serpent, c’est un éléphant qui se décharge de sa peau. L’Ombre Banche nous montre un pachyderme qui perd « sa peau d’ombre » pour en trouver une plus blanche, vision poétique d’une renaissance possible, vierge de tous préjugés, allégorie du mythe de la caverne de Platon. Tu sais, ce passage du monde des illusions à celui de la connaissance. Mais ne t’y fie pas p’tite Lu, cet éléphant là n’est pas réel, juste une ossature d’acier et de fibre de verre recouverte de peaux de buffles cousues… Tout ne serait alors qu’illusion ?
Banque de sable, sable de banque, 2000-2014
Ici, c’est une maquette de sable de 6 mètres de longueur. Elle représente la première banque britannique HSBC construite en 1923 à Shangaï, vanité du pouvoir de l’argent et du capitalisme qui s’effrite et finit par tomber. Ironie suprême, l’œuvre s’est partiellement effondrée lors de son installation. Huang Yong Ping a décidé de la laisser telle quelle puisque pour l’artiste, l’incident fait partie de l’œuvre, toujours en devenir…
Le sage suivant l’exemple de l’araignée qui tisse sa toile, 1994
C’est Marcel Duchamp, l’auteur du célèbre Urinoir, qui à travers ses écrits, a permis à HYP de découvrir l’art occidental alors qu’il était encore en Chine. Il expose ici une copie d’un de ses ouvrages, sur une table surmontée d’un abat-jour habité par une mygale, animal mystérieux et inspirant pour le sage… Comment ça, les araignées ne t’inspirent pas… tu ne serais donc pas une sage p’tite Lu ?
Commencer en tête de serpent et finir en queue de tigre, 1999
HYP prend le contre pied de cette expression chinoise qui veut que l’on se jette parfois dans un projet comme un tigre plein de volonté mais que l’on finit en queue de serpent, découragé et amoindri. Notre finir en queue de poisson à nous en quelque sorte. A travers ce tigre, c’est ici un message optimiste que nous livre l’artiste. Oui, on peut commencer parfois découragé d’avance (un article à écrire, des devoirs à faire pour le p’tit Beurre, une montagne de papiers à ranger… tu vois bien p’tite Lu ?) ce qui n’empêche pas de terminer avec brio telle une tigresse fière et positive ! Et ce n’est pas Joséphine qui nous dira le contraire !
Abbottabad, 2013
L’œuvre reproduit la maison fortifiée où se réfugia Ben Laden avant d’être tué en 2011. La nature reprend ses droits et envahit peu à peu cette demeure maudite qui finira sans doute par disparaître. Un tel lieu rayé de la carte, on adhère !
Ni Hao Ni Hao, 2011
Et voici le rhinocéros démantelé dans son caisson. Triste constat de la disparition de certaines espèces animales au profit d’une exploitation massive des richesses de l’Afrique, ici le charbon et le minerais de chrome que contemple l’animal devenu récipient de sa propre infortune. Pourquoi Ni Hao? Parce que les enfants de Brazzaville saluent ainsi les occidentaux… Habitués qu’ils sont à fréquenter les chinois qui sont leurs premiers partenaires commerciaux.
Carte du monde, 2000-2007
Et puis le monde, non plus bleu, mais épluché comme une orange… le globe a perdu ses continents qui se retrouvent aplatis au mur et épinglés tels des poupées vaudou dans une grande spirale déroulée. Épluché mais aussi victime passée ou à venir de 431 catastrophes naturelles présagées par Li Yu, une auteure chinoise qui en a publié la liste dans un de ses livres. Voilà qui ne laisse rien présager de bon. A trop presser le monde, il pourrait bien se retourner contre nous…
J’espère que cette visite ne t’aura pas trop re-muée p’tite Lu… Je te propose une plongée dans le Balapapa, sous la grue jaune et je te retrouve dare d’art pour un autre renc’Art !
Les mues de Huang Yong Ping
du 27 juin au 2 novembre 2014
HAB galerie, Hangar à Bananes, 21 quai des Antilles
Entrée libre
du 27 juin au 14 septembre, tous les jours de 10h à 19h
du 15 septembre au 17 octobre, du mardi au dimanche de 13h à 18h
du 18 octobre au 2 novembre, tous les jours de 10h à 18h
7 août 2014 - 14:22
bonjour, en vacances, je visite des galeries mais là, c’est géantissime !
merci pour l’article, les photos sont sublimes
2 août 2014 - 11:56
Grâce à cet article, Aude nous invite à découvrir un artiste sensible aux évènements et problématiques qui secouent et marquent notre monde. L »intérêt est suscité, l’envie d’aller à cette exposition pour voir la migale, rester coi devant la longueur de la peau de serpent et constater l’effritement « pour de vrai » du symbole du monde financier… Une visite qui ne se terminera pour nous ni en queue de serpent, ni en eau de boudin.
1 août 2014 - 14:58
Même en vacances,Aude a l’art
de nous faire vibrer!!! Elle s’insinuer en nous,tel un serpent, pour nous faire méditer sur le monde…Après cette lecture et ces commentaires je suis é-mue.
Merci encore et sur ce,je vais méditer d’art,d’art!!!!